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Surréaliste : les restes de Salvador Dali exhumés 28 ans après sa mort

La dépouille de Salvador Dali va être exhumée à la demande de la justice espagnole pour un test de paternité

Pilar Abel, 61 ans, fille d'une femme de ménage de la région de Gérone (Catalogne), serait-elle le fruit des amours illégitimes du fameux et fantasque Salvador Dalí ? Cette question passionne et amuse toute l'Espagne, plus qu'elle ne la scandalise – à l'image de la nature théâtrale du peintre surréaliste. D'autant que le mystère devrait être dissipé sous peu : la juge Maria del Mar Crespo, à Madrid, a en effet autorisé l'exhumation du cadavre du génial peintre, enterré dans la crypte du musée Dalí de Figueras, en Catalogne. Celle-ci, dont la date n'a pas été fixée précisément, devrait avoir lieu au cours du mois de juillet. Les restes osseux ou dentaires de Salvador Dalí seront alors livrés à l'Institut national de toxicologie pour déterminer si, oui ou non, Pilar Abel est la fille biologique de l'artiste. À la mi-septembre, si cette filiation est avérée, le procès qui sera alors organisé, opposant la fille supposée et les membres de la Fondation Gala-Salvador Dalí, qui rejettent en bloc la véracité de cette réclamation, ne devait pas manquer de piquant.

On ne sait pas beaucoup de choses sur celle qui a formulé une demande en paternité. Blonde teintée, portant souvent une veste en jean, résidente de Figueras, Pilar Abel Martinez tient peut-être sa revanche, après de longues années de quête infructueuse. Elle n'avait que huit ans, dit-elle, lorsqu'elle aurait appris – par sa grand-mère – qu'elle était une progéniture de Salvador Dalí. Selon ses dires, en 1955, alors que le peintre installé à Port Lligat est déjà une figure internationale, sa mère Antonia Martinez del Haro et lui auraient eu « à plusieurs reprises des relations sexuelles ». Sa mère, alors âgée de 25 ans, travaillait comme domestique dans la propriété de riches amis du peintre, à Cadaquès. Dans ses écrits, l'artiste disait alors : « Je me trouve dans un état d'érection intellectuelle permanente, et tout s'anticipe à mes désirs… » Coïncidence ? Toujours est-il que, à en croire la prétendue fille née de ces supposés ébats, une fois enceinte, Antonia aurait décidé – pour éviter le scandale public – de donner à l'enfant le nom de famille d'un de ses amis, un certain Juan Abel.

Héritage

Pilar ne cache pas sa joie aujourd'hui, persuadée que la « justice va enfin (me) donner raison ». En 2007, d'abord à Madrid puis à Paris, elle s'était soumise à deux tests de paternité, à partir de supposés restes de l'artiste – des bouts de peau et de cheveu sur un masque en plâtre –, mais cela n'avait pas été considéré comme une preuve par la justice. Aujourd'hui, la juge Maria del Mar Crespo estime que l'exhumation « est la seule manière de faire toute la lumière sur l'affaire ». Longtemps muette, la fondation Gala-Salvador Dalí, qui gère les droits et le legs du peintre, vient de faire savoir qu'elle fera appel cette décision judiciaire. Qui, concrètement, pourrait aboutir au fait qu'un quart de l'héritage revienne à Pilar Abel.

Dans le quotidien El País, le chroniqueur Jesus Ruiz Mantilla s'en donne à cœur joie à propos de cette intrigue : « Voici que le Grand Masturbateur, celui qui se disait grand voyeur, grand onaniste et épris de sadomasochisme, pourrait s'être en réalité comporté comme un de ces messieurs qui troussent les domestiques. Si c'est le cas, quel triste destin petit-bourgeois pour celui qui disait briser tous les tabous ! »